Gazon maudit

Extrait Journal du Dimanche


 

Les supporters des Aiglons auront-ils un jour un stade digne de ce nom, homologué et capable d'accueillir de grandes manifestations ? Après la confirmation cette semaine de l'ordonnance administrative suspendant l'exécution du contrat passé entre la ville de Nice et un groupement d'entreprises, certains parlent de malédiction.

Avec près de 33.000 places et une galerie commerciale, le projet avait pourtant fière allure. Mais une fusée judiciaire à deux étages a brisé le rêve. Premier étage : cet été, le préfet des Alpes-Maritimes défère devant le tribunal administratif la délibération du conseil municipal du 13 janvier dernier attribuant le marché au groupement d'entreprises Cari-Spada. Résultat: la juridiction stoppe net le chantier. Une décision confirmée vendredi par la cour administrative d'appel de Marseille. L'affaire sera examinée sur le fond dans plusieurs mois. La ville n'aurait pas fixé dans le cahier des charges la tarification applicable, en clair le prix des places.

Deuxième étage: alerté en septembre par la Direction départementale de concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DDCCRF), le procureur de Nice, Eric de Montgolfier, a ouvert une enquête préliminaire pour « favoritisme ». La DDCCRF aurait décelé une inégalité de traitement des deux candidats en lice pour la construction et l'exploitation du stade, le groupe Vinci et le groupement Cari-Spada. De bonne source, les éléments constitutifs des faits présumés de « favoritisme » auraient été rassemblés.

Le sénateur-maire (UMP) de la ville, Jacques Peyrat, se demande désormais s'il ne vaut pas mieux repartir à zéro plutôt que d'attendre l'examen sur le fond. L'élu, qui voit dans ces revers judiciaires une nouvelle attaque contre sa personne, n'hésite pas à dénoncer une « campagne électorale lancée par les institutionnels, la justice et la préfecture ». « On veut me signifier un bon de sortie, on n'y parviendra pas », assène l'édile qui vient d'annoncer qu'il se représentera aux municipales.

Les plus virulents sont aujourd'hui les supporters. « Sur des blogs ou des sites de supporters, certains, en parlant de moi, disent qu'ils ne souhaitent la mort de personne mais... Et quelqu'un écrit que si je viens au stade, je serai crucifié », déplore Jean-François Knecht, conseiller municipal socialiste à l'origine de la saisine du tribunal administratif. Cet ex-prof, conseiller pédagogique en éducation physique pendant de longues années, a décidé de déposer plainte contre X pour menaces de mort. « Je n'ai rien contre le foot, j'ai simplement fait mon devoir d'élu. » Quant aux joueurs, ils ont reçu l'ordre de ne faire aucun commentaire sur le sujet. L'urgence, c'est le terrain.